FT-CI

Egypte, un an après le début du processus

Ramy Essam, la bande originale de la révolution

27/02/2012

Par Jamila Al-Mukhtar

Lorsqu’il est arrivé sur une Place Tahrir pleine de manifestants le 31 janvier dernier, Ramy Essam n’était qu’un simple étudiant de 23 ans inscrit en architecture. A Mansoura, où il suivait ses cours à la fac et où il habitait avec sa famille, il avait déjà participé avec son frère Shady aux premières manifestations contre le régime de Moubarak. C’est alors qu’il décida de laisser derrière lui la région du delta du Nil, ã quelques encablures du bastion ouvrier de Mahalla, pour faire le voyage la capitale, en emmenant avec lui sa guitare, et rien d’autre. Par la suite, les dix-huit jours qui ont secoué l’Egypte ont également transformé sa vie, comme celle de centaines de milliers d’autres manifestants. En l’espace de quelques jours les chansons de Ramy Essam sont devenues celles des manifestants ã Tahrir. Ramy a composé pendant le processus même la « bande originale » du début de la révolution égyptienne...


Ramy Essam sur la Place Tahrir en janvier 2011

Des slogans et une guitare

Enthousiasmé par les slogans lancés en permanence par les manifestants, il a commencé à les mettre en musique. C’est ainsi que « Irhal » (« Dégage ! ») a vu le jour en l’espace de quelques heures.

Après le fameux message télévisé du Raïs au cours duquel Moubarak affirmait sa volonté de rester au pouvoir jusqu’aux élections prévues alors en septembre, Ramy est monté sur un des podiums dressés à la hâte Place Tahrir en improvisant devant la foule une autre de ses chansons qui est devenue depuis un standard de la révolution : « Yasqot yasqot Hosni Moubarak ! – Irhal ! Irhal ! » (« A bas, ã bas Hosni Moubarak ! – Dégage ! Dégage ! »).

Après cette soirée mémorable, Ramy a commencé ã chanter tous les jours sur le campement de la Place Tahrir. Les mots d’ordre des manifestants étaient la toile de fond de ses chansons et les accords de sa guitare donnaient du courage aux révolutionnaires.

Il a continué ã chanter, même lorsque la situation a commencé ã devenir vraiment sérieuse. Le 2 février, les sbires du régime ont attaqué Pace Tahrir. C’était le jour de la « Bataille des chameaux », dont les images ont fait le tour des télévisions du monde entier. Pris ã parti et roué de coups par les baltagiyya (les mercenaires de l’ancien du régime), Ramy a été blessé. Il n’en a pas moins continué ã chanter, le visage tuméfié. « C’était drôle, a-t-il déclaré par la suite. J’avais la tête recouverte de bandages, et ceux qui m’écoutaient étaient eux aussi méconnaissable, recouverts de bandages et de compresses ».

Riez ! C’est la révolution…

C’est que Ramy ne manque pas de sens de l’humour. Et au cours de ces dix-huit jours d’occupation et de lutte Place Tahrir il fallait aussi être en capacité de rire, pour mieux combattre. La révolution n’est jamais un dîner de gala. Mais ce n’est pas non plus une cérémonie funèbre. « Ed7ako ya Sawra » veut dire « Riez bien, c’est la révolution ! ». Dans cette chanson, accompagné par sa guitare de toujours qui reprend des accords qui ne sont pas sans rappeler une ritournelle rock’n roll des années Soixante, Ramy tourne en dérision la propagande contre-révolutionnaire officielle de Moubarak. Le régime accusait en effet dans les médias les manifestants d’être au service de l’étranger, d’être responsables de la banqueroute économique du pays et d’être payés ã coups de hamburgers et de sandwichs. « On vous dit que nous mangeons des menus Kentucky Fried Chicken (KFC) ? Riez ! C’est la révolution ! » dit ironiquement la chanson. Et alors, le public reprenait en chœur, entre deux charges de la police.

« Pain, liberté et justice sociale ! »

Le 11 février, lorsque la télévision a annoncé la démission de Moubarak et que l’information se répandait comme une traînée de poudre partout en Egypte, Ramy a repris « Irhal ! » (« Dégage ! ») Place Tahrir, une chanson qui était devenu entre-temps l’hymne de la révolution et que la revue Time Out a classée parmi les 100 chansons qui ont changé le monde [1]. Un an après le début du processus, une année émaillée de nouvelles mobilisations ouvrières et de la jeunesse mais aussi d’une répression brutale de la part des Forces Armées égyptiennes, Ramy n’a pas cessé de chanter la révolution.

En septembre il a sorti une nouvelle chanson, intitulée « Pain, liberté et justice sociale ! ». Le titre reprend l’un des slogans scandés par les manifestants en janvier et février derniers et qui continue ã animer aujourd’hui les protestations, occupations et grèves. En effet, rien de ce qui était revendiqué l’an dernier n’a été obtenu.

« A bas le régime militaire ! »

Aujourd’hui Ramy comme beaucoup de jeunes Egyptiens révoltés n’a aucune confiance dans le régime militaire qui gouverne le pays. C’est d’ailleurs ces mêmes militaires qui l’ont arrêté le 9 mars dernier et qui l’ont torturé à l’électricité, au sein même du Musée National du Caire, avec plusieurs dizaines d’autres militants pendant plus de quatre heures [2]. Cette terrible épreuve a fini par le convaincre, si cela était encore nécessaire, des desseins réels des Forces Armées.

En novembre-décembre il a appelé au boycott du cirque électoral organisé par le Conseil Suprême des Forces Armées (SCAF) après les bains de sang qui ont émaillé les manifestations de cet automne.Il est parfaitement conscient du fait que les militants doivent être plus vigilants que jamais. « La contre-révolution, dit-il, ne chôme pas, et essaie de regagner du terrain… et nous ne sommes plus aussi unis qu’auparavant. Il ne faut pas que nous perdions ce que nous avons commencé ã gagner ».

Ses chansons continuent ã rythmer les manifestations. Depuis prés d’un an d’ailleurs ce n‘est plus Moubarak qui est visé par le fameux « Irhal ! » (« Dégage ! »). Ramy a changé le refrain : « Yasqot, yasqot hokem el a’skar ! – Madineya ! » (« A bas, ã bas le SCAF ! – Etat civil ! [par opposition au régime militaire actuel]). C’est désormais la chanson qui est entonnée dans les manifestations. L’espoir est que le nouveau refrain contribue ã accompagner le processus actuel de lutte et qu’il débouche effectivement sur le fameux « Thwara hattâ el-nasr ! » (« La révolution jusqu’à la victoire ! ») que scandent les manifestants et Ramy, en chœur.

25/01/12

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