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Le PS et « l’affaire Leonarda » : du cynisme au pathétique
par : Philippe Alcoy

24 Oct 2013 | « Je n’irai pas seule en France, je n’abandonnerai pas ma famille (…) Je ne suis pas la seule ã devoir aller à l’école, il y a aussi mes frères et mes sœurs ». Voilà comment répondait Leonarda Dibrani, collégienne Rrom de 15 ans expulsée de la France vers le Kosovo le 9 octobre dernier, aux déclarations cyniques de François Hollande lui proposant de rentrer (...)
Le PS et « l’affaire Leonarda » : du cynisme au pathétique

« Je n’irai pas seule en France, je n’abandonnerai pas ma famille (…) Je ne suis pas la seule ã devoir aller à l’école, il y a aussi mes frères et mes sœurs ». Voilà comment répondait Leonarda Dibrani, collégienne Rrom de 15 ans expulsée de la France vers le Kosovo le 9 octobre dernier, aux déclarations cyniques de François Hollande lui proposant de rentrer en France pour poursuivre ses études… mais sans sa famille !

Avec cette proposition Hollande tranche clairement en faveur de Manuel Valls, la figure réactionnaire la plus emblématique de son gouvernement. Cela s’explique par le poids de Valls dans l’opinion publique (notamment des sympathisants de droite). Il ne faudrait pas oublier que la popularité de Hollande est historiquement faible pour un président (23%), donc le maintient de son ministre de l’Intérieur est fondamental. Mais Hollande prend cette position en essayant de donner quelques gages à l’électorat de gauche qui sont aussi ridicules que provocateurs. C’est en ce sens qu’il est critiqué ã gauche comme ã droite, sans arriver ã mettre un terme à l’affaire.

Hollande rate son « coup » pour calmer la situation

Alors que le gouvernement PS pensait qu’en proposant le retour de Leonarda toute seule il avait trouvé une « synthèse » entre « fermeté et humanisme », son coup s’avère complètement raté. En effet, il ne satisfait personne. Il s’en prend plein la figure aussi bien des secteurs réactionnaires et xénophobes allant du FN jusqu’aux centristes de l’UDI de Jean-Louis Borloo, que des partis ã sa gauche, y compris certains de ses adhérents. Cela est d’autant plus grave pour lui que c’est Hollande lui-même qui a décidé de s’exposer dans cette affaire, arrivant même ã une situation « surréaliste » où, comme affirme un responsable du PS, « le président de la cinquième puissance du monde est interpellé depuis Mitrovica par une gamine de 15 ans... » [1]. En effet, ce sur quoi le gouvernement ne comptait surement pas c’est la détermination de Leonarda elle-même qui, encouragée par les démonstrations de soutien des lycéens et lycéennes en France, a tenu tête au président et exigé le rapatriement de toute sa famille.

En même temps, ã droite on faisait la queue pour lancer des déclarations réactionnaires contre le retour de Leonarda et de sa famille. Mais c’est Marine Le Pen, la présidente du FN, qui a exprimé de la façon la plus directe et conséquente la politique xénophobe et raciste de l’Etat français. Pour celle-ci Hollande a « appuyé sur le bouton de l’aspirateur ã clandestins » en montrant une image faible de la figure présidentielle et a exigé de mettre fin à la « scolarisation obligatoire des enfants clandestins, dont on voit bien que l’on se sert aujourd’hui pour éviter l’expulsion des parents » ainsi que « la suppression dans la loi de la possibilité de régulariser un clandestin : toute personne qui vient ou se maintient d’une manière illégitime sur le territoire national ne doit même pas pouvoir envisager d’être régularisée » [2].

La jeunesse dans la rue, Hollande inquiète

Qu’ils soient de droite ou de gauche, tous les gouvernements craignent que la jeunesse descende dans la rue. Sa peur est trop grande de voir un mouvement explosif de la jeunesse, très difficilement contrôlable, qui entraine derrière lui d’autres secteurs populaires, notamment du mouvement ouvrier. Et cela spécialement aujourd’hui que nous connaissons un gouvernement PS très ã droite et que le mécontentement parmi les masses est très important, même si pour l’instant les bureaucraties syndicales et les partis réformistes l’ont empêché de s’exprimer dans les rues [3].

Le contexte politique, social et économique international a aussi un poids. On a vu en effet dans différents pays la jeunesse jouer un rôle central dans les mobilisations contre les politiques antipopulaires des gouvernements ã travers le monde. C’est évidemment cela que Hollande craint. Les médias contribuent à leur façon pour empêcher cette perspective. Ce n’est pas un hasard si tous les médias essayent de délégitimer l’action des lycéens en mettant en avant leur soi-disant volonté de manifester pour « sécher les cours » ou leur supposée prédisposition ã être « manipulés » par des partis d’extrême-gauche.

Pour l’instant le gouvernement compte sur les vacances de la Toussaint pour que le niveau de mobilisation à la rentrée baisse et que la « bombe » se « désamorce naturellement ». Mais rien n’est dit qu’à la rentrée la mobilisation reprenne, comme certaines tentatives d’organisation entre des jeunes de différents lycées sembleraient l’indiquer, notamment la réunion qui a rassemblé des lycéens de 37 lycées différents de Paris lundi 21/10 et leur probable participation à la manifestation du 24/10. La FIDL appelle même ã une manifestation lycéenne le 5 novembre.

Suivre l’exemple du mouvement lycéen !

Les expulsions de Leonarda et Khatchik et les mobilisations qu’elles ont déclenchées ouvrent la crise la plus importante du gouvernement depuis son élection, plus importante encore que Florange ou l’affaire Cahuzac, puisqu’elle touche au cœur du gouvernement. Celle-ci, en plus de toucher à l’autorité de la figure présidentielle, provoque des frictions de plus en plus fortes entre Ayrault et Valls. En même temps, l’affaire Leonarda a créé une forte contradiction entre le gouvernement et le PS, son secrétaire général Harlem Désir, un personnage généralement suiviste, se prononçant même pour le retour de Leonarda avec ses frères et sa mère.

Quelques jours d’un mouvement explosif de la jeunesse ont suffit pour donner un coup ã un gouvernement très impopulaire, forçant le président lui-même ã s’exposer. Regrettablement, ni l’adoption de l’ANI, ni celle de la réforme des retraites n’ont frappé le PS de cette façon. La grande responsabilité de cela retombe sur les directions syndicales qui consciemment démobilisent et tentent de démoraliser les travailleurs.

Les difficultés de Hollande ã trouver une « synthèse » dans cette affaire, montre que sa méthode du « consensus » et de la « concertation avec les partenaires sociaux », si efficace pour maintenir la « paix sociale » jusqu’à présent, commence ã rencontrer des limites. Les premiers signes d’exaspération de la part d’un électorat de gauche comme sont les étudiants ou la situation d’indignation qui traverse la Bretagne (où Hollande avait fait un bon score -56%- lors des présidentielles), dans le cadre d’un plan social chez PSA et une crise de la filière agroalimentaire, ouvrent la possibilité ã ce que des nouvelles brèches puissent s’ouvrir et permettre qu’un grand mouvement de masses contre la politique antipopulaire et réactionnaire du gouvernement se développe. S’il est vrai qu’il existe un secteur de la population en France, plus visible actuellement, chauvin et xénophobe penchant pour le FN, auquel l’UMP et le PS s’adaptent de plus en plus, il est vrai aussi qu’un autre secteur ouvrier et populaire qui pourrait relever la tête !

23/10/2013

 

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