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1979-2010 : 30 Ans de luttes et de combats ã Zanon
par : FT-CI France

07 May 2010 |

1979

Inauguration de Cerámica Zanon S.A. par les autorités militaires argentines. Cerámica Zanon, entreprise industrielle de capital privé, propriété de l’homme d’affaires italo-argentin Luigi Zanon, est une des principales usines de la Zone Industrielle (Parco Industrial) de Neuquén.

1983

Après la fin de la dictature militaire argentine, naissance du Syndicat des Ouvriers et Employés Céramistes de Neuquén (SOECN), affilié à la Fédération des Ouvriers Céramistes de la République Argentine (FOCRA), dépendant ã son tour de la CGT.

1993

Le président ultralibéral Carlos Menem, ami de la famille Zanon, participe à l’inauguration des lignes de production de porcellanato permettant la production d’un revêtement céramique de haute qualité. Zanon est ã cette époque l’usine de porcellanato la plus importante et moderne d’Amérique du Sud. C’est encore aujourd’hui la seule usine produisant du porcellanato en Argentine.

1996

En octobre, première grève à l’usine en dé-fense d’un ouvrier licencié. Silvio Centurión sera finalement réintégré ã son poste par la direction.

1998

La Liste Marron, opposition syndicale animée par Raul Godoy et d’autre travailleurs combatifs et antibureaucratiques, remporte les élections de la Commission Interne (syndicat d’entreprise) de Zanon. Elle gagne contre la liste bureaucratique des frères Montés qui jusqu’alors dominaient la CI et continuent ã contrôler le SOECN auquel sont affilié quatre usines céramistes de la province.

2000

La direction de Zanon présente un premier « plan préventif de crise ».
En juin, Daniel Ferrás, jeune ouvrier de 22 ans, meurt à la suite d’un accident survenu sur une des lignes de production de l’usine, en raison de l’incurie patronale par rapport aux normes de sécurité. S’ensuit une grève de 9 jours qui permet l’obtention d’une ambulance 24h sur 24 dans l’usine ainsi que la mise en place de mesures d’hygiène et sécurité garanties par une Commission Ouvrière de contrôle.

Les frères Montes organisent en octobre une as-semblée ã Cutral-Có, ville distante d’une centaine de kilomètres de Neuquén, un jour de semaine, afin d’organiser la Junte électorale d’organisation des élections de la nouvelle direction (ou Commission Directive) du SOECN au niveau régional. L’idée est de constituer une Junte ad hoc afin de truquer les élections, ce qui permettrait aux frères Montes de garder la mainmise sur le syndicat. En dépit des menaces de licenciement, les ouvriers de Zanon débraient en bloc et se rendent à l’AG. Le processus de reconquête du SOECN prend corps.

En décembre les ouvriers des quatre usines de l’in-dustrie céramique de la région dont Zanon est la plus importante dans la province votent massivement pour la liste oppositionnelle, ou Liste Marron, conduite par Godoy, aux élections syndicales régionales. C’est ainsi que le SOECN, 21° section de la FOCRA, est repris des mains de la bureaucratie syndicale pro-patronale par les travailleurs.

2001

Entre avril et mai les travailleurs de Zanon sont mis en chômage technique en raison du « manque de matières premières ». S’ensuit une grève de 34 jours des travailleurs qui manifestent et bloquent le pont qui sépare les provinces de Río Negro et Neuquén. La direction fait marche arrière, paie les jours de grève et les arriérés de salaire. Une nouvelle CI est élue, toujours dirigée par la liste Marron.

En août les ouvriers céramistes appellent ã une Rencontre pour la Coordination Ouvrière. La Ren-contre a lieu à l’Université du Comahue, ã Neuquén. Y participent les piqueteros, les travailleurs au chômage organisés du MTD Neuquén, des courants syndicaux oppositionnels du secteur enseignant de Neuquén et Río Negro mais également des délégués syndicaux combatifs de tout le pays.

Début septembre la direction annonce la mise au chômage technique d’une bonne partie des ouvriers et organise un lock-out. Les travailleurs se mettent en grève et imposent le paiement des arriérés et des jours de grève.

En octobre la justice reconnaît que la manœuvre patronale est bien un lock-out offensif. Les tra-vailleurs organisent la garde ouvrière de l’usine et contrôlent 40% du stock afin de garantir leurs salaires. La direction répond par le licenciement des 380 ouvriers céramistes. Ces derniers brulent collectivement les télégrammes de licenciement et organisent une grande manifestation en direction du siège du Gouvernement provincial qui se termine par l’arrestation de 6 travailleurs.

Début décembre les travailleurs céramistes parti-cipent à la grève générale appelée par la CTA, la seconde centrale syndicale argentine après la CGT, contre les mesures d’austérité du gouvernement De La Rúa. Le gouvernement provincial de Sobisch réprime ã nouveau.

A la suite des journées révolutionnaires des 19 et 20 décembre le gouvernement De La Rúa est renversé. Son successeur, Rodríguez Saá, fera long feu. Les travailleurs de Zanon, qui continuent ã occuper l’usine, participent aux manifestations qui ont également lieu ã Neuquén alors que la crise économique profonde dans laquelle se trouvait déjà plongé le pays se poursuit.

2002

En mars les ouvriers de Zanon rouvrent le gaz et rallument quatre fours. L’instrument de production est donc remis en marche par les travailleurs eux-mêmes. Un mois après, les 20.000 premiers m² de revêtement céramique sortent des lignes de production.

Parallèlement, les ouvriers de Zanon mettent en place la Coordination de l’Alto Valle dont font bien entendu partie le SOECN, le MTD Neuquén mais aussi les autres organisations piqueteras de la région, les enseignants d’ATEN de Centenario, la banlieue de Neuquén, les travailleurs du secteur public, de la santé et de la construction. Les organisations étudiantes et les partis d’extrême gauche participent également ã ce processus. La Coordination acquiert un poids réel au niveau régional, réunit les organisations combatives et représente une alternative face à la bureaucratie syndicale.

Le 13 avril se tient ã Buenos Aires, dans les locaux de l’usine textile Brukman, la Première Rencontre Nationale des Entreprises Récupérées. Le premier numéro de Nuestra Lucha [Notre Lutte], le journal ouvrier impulsé par les travailleurs de Zanon, Brukman, d’autres usines occupées et des syndicats et délégués combatifs sort. Il sera par la suite distribué dans les kiosques. 10 nouveaux postes de travail sont créés ã Zanon.

Plus de mille personnes assistent par la suite à la Rencontre Régionale de la Coordination de l’Alto Valle. La Deuxième Rencontre Nationale des Usines Récupérées se tient début septembre ã Brukman.

2003

30 postes de travail sont créés. L’usine produit désormais 120.000 m² de revêtement céramique et de carrelage par mois.

En février les travailleurs de Zanon participent aux côté des étudiants et des secteurs militants de Neuquén aux manifestations contre l’agression impérialiste en Irak. Cela avait déjà été le cas en 2001 au cours des préparatifs de la guerre contre l’Afghanistan.

En mars se tient la Troisième Rencontre Nationale des Entreprises Récupérées dans les locaux du Su-permarché Tigre de Rosario.

Le 8 avril a lieu la cinquième tentative d’expulsion des travailleurs de Zanon par les forces de répression. Les travailleurs et la population de Neuquén se mobilisent massivement et la CTA appelle ã une grève provinciale. Des milliers de travailleurs se re-trouvent devant l’usine, défendue également par les chômeurs organisés. L’opération policière se solde par un échec.

Les travailleurs présentent à l’Assemblée législative provinciale un projet de Loi d’Expropriation Sous Contrôle et Gestion Ouvrière, accompagnée d’une pétition de 50.000 signatures (la province de Neuquén compte un peu plus de 470.000 habitants).

En novembre les forces de répression provinciales interviennent aux abords du Stade Ruca Che. Pepe Alveal, travailleur de Zanon, embauché en tant que jeune militant piquetero du MTD est la cible des tirs en balles en caoutchouc de la police. Il perd un œil.

2004

Naissance en février de la coopérative FASINPAT (acronyme espagnol d’Usine sans patrons). Les ouvriers ont toujours revendiqué la nationali-sation de l’usine sous contrôle ouvrier. En fonction du rapport de force au niveau provincial et national, les travailleurs acceptent néanmoins de sortir de l’illégalité de fait qui caractérisait la situation de l’usine occupée jusqu’alors et de constituer de manière transitoire une coopérative de production sous gestion ouvrière directe tout en continuant ã revendiquer l’expropriation pure et simple de Zanon.

Au cours de cette période Fasinpat construit un dispensaire dans le quartier de Nueva España. Les travailleurs ont toujours conçu l’usine comme un instrument au service des luttes et des besoins de la population laborieuse. C’est en ce sens qu’ils ont contribué à la rénovation d’écoles, de l’Hôpital Castro Rendón de Neuquén, qu’ils ont signé une convention d’exploitation des carrières de terre sur les territoires historiques des Mapuches, contribuant ã montrer qu’en expropriant le patronat la gestion ouvrière de l’économie ã grande échelle ne serait pas seulement plus efficace que la gestion bourgeoise traditionnelle mais que les travailleurs ont entre leurs mains la clé des problèmes de logement, d’emploi et d’oppression auxquels font face les classes subalternes.

En novembre les ouvriers de Zanon installent une tente devant le Congrès National ã Buenos Aires et reçoivent le soutien de nombreuses personnalités du spectacle et du monde intellectuel lorsqu’ils présentent ã nouveau le projet de Loi d’Expropriation. L’année se clôt ã Neuquén avec un grand concert dans le cadre duquel se produisent les grands noms de la musique argentine : León Gieco, Raly Barrionuevo et Ataque 77.

2005

Année de grandes tensions, le patronat revient à la charge de manière extrêmement dure. Plusieurs dirigeants céramistes ainsi que des membres de leur famille sont menacés de mort. La femme d’un des ouvriers est même agressée. La CTA répond par une grève provinciale, les céramistes se mobilisent massivement et le Prix Nobel de la Paix Adolfo Pérez Esquivel en personne se rend ã Zanon pour exprimer son soutien à la lutte des travailleurs.

Le 2 avril est organisé la Rencontre Ouvrière Natio-nale qui appelle à la coordination nationale des organisations ouvrières combatives ã un moment où les conflits ouvriers commencent ã refaire la une des journaux après des années de reflux général en raison du poids de la crise et de la terreur du chômage de masse.
En juillet une AG extraordinaire du SOECN approuve les nouveaux statuts du syndicat. L’idée est de pérenniser dans les textes le caractère lutte de classe, démocratique et combatif du syndicat, de manière ã ce qu’il puisse servir d’exemple au niveau national et même audelà .

La justice prononce la faillite définitive de Zanon en août et autorise la Coopérative Fasinpat ã administrer l’usine pendant un an ã partir d’octobre.

2006

La Convention Constituante de la Province de Neuquén promet aux ouvriers qu’elle reçoit de discuter de la Loi d’Expropriation de Zanon au cours de la législature qui est sur le point de s’ouvrir. Les députés ne respectent bien évidemment pas leur promesse.

Au mois de mai, les travailleurs de Zanon présentent ã nouveau la Loi d’Expropriation devant l’Assemblée législative provinciale, appuyés par une manifestation massive de la population qui a ã nouveau signé la pétition de soutien ã Zanon (20.000 signatures).

Plusieurs groupes de rock jouent à l’usine cette an-née-là , notamment Rata Blanca et Ataque 77. Le slogan des travailleurs devient « Des concerts sans flics dans une usine sans patrons ».

En octobre l’administration ouvrière de l’usine par Fasinpat est prorogée.

2007

Les céramistes accompagnent la lutte des enseignants de la région, notamment à la suite de la mort par balle de Carlos Fuentealaba. Ils participent à la manifestation massive organisée ã Neuquén exigeant la démission du gouverneur Sobisch.

A partir de septembre 2006, lors de la « disparition » de Julio López, ouvrier à la retraite, témoin lors des procès contre les responsables de la dictature militaire argentine de 1976-1983, les travailleurs du SOECN font grève et participent ã toutes les manifestations exigeant sa réapparition.

Zanon produit prés de 400.000 m² de revêtement céramique et de carrelage. 470 ouvriers et ouvrières y travaillent. En septembre les travailleurs produisent les premières palettes de carrelage destinées à l’exportation.

2008

Les manifestations pour l’expropriation se poursuivent. Dans le cadre de la XXIII Rencontre Nationale des Femmes qui se tient cette année-là ã Neuquén, un rassemblement massif dans l’usine et devant les grilles témoigne de l’énorme soutien populaire dont jouissent les travailleurs de Zanon.

En octobre l’administration ouvrière de l’usine prend légalement fin. Les travailleurs continuent bien évidemment ã occuper et ã produire. A cette occasion La Renga, un des principaux groupes de rock argentin, joue devant 15.000 jeunes dans l’usine.

2009

Les ouvriers réouvrent l’ancienne usine Cerámica del Sur sous gestion ouvrière, aujourd’hui plus connue sous le nom de Cooperativa Conocer. C’est la seule usine de briques de Neuquén, une ville où les logements populaires font pourtant cruellement défaut comme en témoigne sa vaste banlieue faite de maisons en tôle et d’habitat précaire.

En mars le projet de loi d’Expropriation est ã nouveau présenté à l’Assemblée législative provinciale qui finit par l’adopter le 12 août.

En juin, les travailleurs du SOECN sont à la tête au niveau national et provincial du mouvement d’opposition au coup d’Etat au Honduras et de soutien à la résistance.
En octobre, sur la lancée de la grève contre les licenciements dans le géant de l’alimentation Kraft Foods Argentina, les travailleurs de Zanon sont à l’initiative d’une Rencontre Nationale afin de débattre de la nécessité de lancer un grand courant politico-syndical national représentant les intérêt des travailleurs. Plus de 400 travailleurs se réunissent dans la salle de conférence de l’Hôtel autogéré Bauen, dans le centre de Buenos Aires, ã cette occasion.

2010

Les travailleurs de Zanon continuent à lutter pour la publication définitive de la loi d’expropriation pourtant votée au mois d’août. Ils soutiennent parallèlement la grève entamée par leurs collègues de Cerámica Stefani de Cutral Có ainsi que la lutte des enseignants de la province de Neuquén.

Le 12 mai, ils étaient ã nouveau en manif aux côtés des travailleurs de l’éducation, entamant leur onzième semaine de grève, pour une augmentation de 35%. C’est tous ensemble que céramistes des cinq usines de la province, enseignants, lycéens et étudiants coupaient dans l’après-midi la voie express de la Zone Industrielle de Neuquén, devant Zanon, à la suite de la fin de non-recevoir du gouvernement provincial par rapport à l’ensemble des revendications unifiées des différents secteurs mobilisés présentées par les céramistes. La lutte continue...

 

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