FT-CI

Hollande, Peillon et l’école

Retour sur les mensonges et les mauvais coups des socialistes… et les luttes dans l’Education

18/03/2013

Par Rosa Lise

L’Education nationale devait être une priorité pour le quinquennat Hollande, comme cela avait été rabâché au cours de la campagne présidentielle. Aujourd’hui, le constat est tout autre. Le gouvernement ne cesse de mettre en œuvre une politique de démantèlement du système scolaire en s’inscrivant dans la continuité des politiques menées par Nicolas Sarkozy et Luc Chatel aussi bien au niveau du primaire, du secondaire que du supérieur.

Cependant, le monde enseignant, refusant une nouvelle dégradation du service public d’éducation nationale, est descendu de façon assez inattendue dans la rue entre janvier et février, chamboulant les plans des syndicats majoritaires et montrant un réel mécontentement face à la politique du gouvernement socialiste.

L’Ecole, promesse du gouvernement Hollande ou continuité de la logique néolibérale de Sarkozy/Chatel ?

Alors que Hollande donnait une importance particulière à l’éducation lors de la campagne présidentielle, aujourd’hui le gouvernement mène lui-même les attaques contre l’Education nationale fortement dommageables pour le système scolaire.

Dans le primaire, Peillon a fait connaître une batterie de projets (décrets et projets de loi) modifiant l’organisation actuelle des écoles. Il prévoit une demi-journée d’école supplémentaire le mercredi matin et réduirait les journées d’école les autres jours. Les enfants ne sortiront pas plus tôt mais auront des activités périscolaires, culturelles ou sportives, organisées par les communes, après les heures de cours. Cette restructuration du système scolaire vise, en réalité, au transfert accru des responsabilités de l’enseignement, hier encore, assumé par l’Etat, vers les collectivités locales. Il s’agit ainsi d’une remise en cause du cadre national de l’enseignement public. De même, il n’est en rien une amélioration des conditions de travail des élèves. En réalité les journées d’écoles seront toujours aussi lourdes avec une pause plus longue le midi et des activités périscolaires l’après-midi de 15h30 ã 16h30. L’égalité sera loin d’être assurée partout puisque les mairies n’auront pas toutes les mêmes moyens pour mettre en œuvre les activités périscolaires. Enfin, cette réforme alourdira le travail des enseignants et des animateurs.

Cette réforme des rythmes scolaires s’ajoute ã une succession de mesures de casse de l’Education nationale. Premièrement, alors que 80.000 postes ont été supprimés au cours des cinq dernières années, le gouvernement ne propose qu’un plan de maintien de 60.000 postes sur cinq ans qui ne correspond en réalité qu’aux départs en retraite. Ainsi, les conditions d’enseignement se dégradent, les classes restent surchargées... Deuxièmement, la loi sur la refondation de l’école prônée par Peillon justifie le fonctionnement de l’école du socle. Il s’agit de construire une école où tous les jeunes ne sont pas aptes ã faire des études longues. Il convient donc de sélectionner le plus rapidement possible les individus en fonction des besoins de l’économie et d’orienter les uns directement vers des métiers et les autres vers des formations post-bac afin de former et d’offrir un éventail de futurs salariés correspondant le plus possible aux besoin du patronat. Enfin, le maintien de l’autonomie des établissements met en concurrence les uns et les autres – avec des moyens différents au final – au détriment de l’égalité de traitement de tous les élèves. Cette proposition vise également ã évaluer les performances de chaque établissement dans le cadre des lois d’évaluation des politiques publiques. La logique d’évaluation participe à la transformation de l’éducation en marchandise. Ainsi, ã cette vision du système scolaire, il en résulte une école encore plus inégalitaire et des conditions de travail dégradées.

Derrière cette logique se cache un véritable projet de société. Celui d’avoir une formation scolaire au service des intérêts du patronat. Toutes ces réformes répondent ã une idéologie : face aux besoins de la bourgeoisie, les projets éducatifs se conçoivent comme une fabrique de main d’œuvre. Il s’agit alors d’adapter les écoles davantage aux entreprises et introduire une gestion beaucoup plus managériale des établissements et des personnels. L’éducation est alors gouvernée selon ces principes issus de l’économie de marché.

Le ras-le-bol des enseignants : un décret de trop

Le gouvernement pensait pouvoir passer ces réformes sans difficultés en associant les directions syndicales aux négociations et non en passant par la force comme l’avaient pu faire Sarkozy et Chatel. Hollande suivait la même logique de consultation entreprise dans d’autres secteurs comme celui de la Santé. Cependant, la pression a monté dans le monde enseignant. De façon assez inattendue, le monde enseignant, pourtant un des secteurs ayant le plus voté PS aux présidentielles, est descendu dans la rue. La réforme des rythmes scolaires est vécue comme la goutte d’eau en trop au regard des attentes que pouvait avoir une des bases électorales du PS. En effet, la question des rythmes a cristallisé d’autres revendications, par rapport à la question du point d’indice, de la disparition des RASED, etc. La réaction des enseignants s’est organisée et les enseignants se sont alors vite mobilisés massivement contre la dégradation du système scolaire.

La pression enseignante a obligé les syndicats ã appeler à la mobilisation. Depuis le début de l’année, les enseignants se sont mobilisés ã plusieurs reprises : le 17 janvier, puis le mardi 22 janvier, ã Paris notamment, avec 90% de grévistes. Le 12 février, les cinq syndicats enseignants ont appelé à la grève. Cette journée de mobilisation a enregistré une participation beaucoup plus importante que pour la grève de la fonction publique du 31 janvier 2013, pour laquelle le ministère avait annonçait 18% de grévistes. Au niveau national, pour cette journée du 12 février, le ministère a annoncé un taux de grévistes de 37%. L’appel fut très suivi en région parisienne. Pour beaucoup, le mouvement parisien était « historique », avec un taux de grévistes de plus de 90% et 56% d’écoles fermées.

Les syndicats, une force pour exiger le retrait des textes ou un frein au mouvement ?

Les syndicats majoritaires (SNUipp et SNES, au sein de la FSU), loin d’être un instrument de résistance, freinent le mouvement des enseignants qui désirent le retrait pur et simple de la réforme sur les rythmes scolaires. Les syndicats majoritaires proposent, par une concertation, la réécriture des différents projets de lois. Ainsi, la direction du SNUipp, premier syndicat dans le premier degré, avait appelé le 12 février ã un report de la réforme à la rentrée 2014. Cet appel est significatif des intentions réelles des directions syndicales de l’Education nationale : loin de revendiquer l’abrogation du décret, elles demandent ã ce que les conseils d’écoles soient consultés, les possibilités de dérogations et le report du décret. Le mouvement, impulsé par la base, ne peut s’appuyer sur les directions syndicales pour se mobiliser pour l’abrogation.

Afin de faire reculer le gouvernement et revenir sur l’ensemble des contre-réformes qui s’appliquent dans l’Education nationale depuis ces dernières années, le monde enseignant ne peut compter que sur les mobilisations. Il lui faudra étendre les méthodes adoptées par les enseignants ces dernières années, en approfondissant les expériences d’organisation en assemblées générales de villes ou de département à l’exemple des assemblées générales parisiennes, ou encore en Seine-Saint-Denis ou dans le 92. Les enseignants devront également étendre la mobilisation dans le secondaire et dans le supérieur, non exempts des réformes destructrices de l’enseignement public. Alors que l’enseignement primaire et secondaire se battent contre une même logique, les directions syndicales continuent de compartimenter la mobilisation. Or, il faut exiger des syndicats majoritaires de lier les revendications afin que ce soit aux grévistes de décider du calendrier, des mobilisations et que les syndicats répondent aux mandats de la grande majorité des collègues mobilisés qui exigent le retrait du texte.

La lutte contre les réformes du système éducatif a certes marqué le pas avec l’entrée dans la période des vacances d’hiver mais ne perd pas le rythme face à la conception de l’école et du travail que veut imposer le gouvernement. En effet, le 25 mars, à l’appel des principaux syndicats départementaux (SNUipp-FSU, SNUDI-FO, SUD Education, CGT Educ’action...), les professeurs des écoles seront de nouveau en grève ã Paris pour le retrait du décret sur les rythmes scolaires. Le 28 mars, plusieurs fédérations, Sud Education, CGT, FO et CNT, appellent tous les personnels ã faire grève pour l’abrogation du décret et sur l’ouverture de réelles négociations sur les revendications des personnels. Pendant ce temps, la FSU appelle ã une manifestation avec les parents d’élèves le samedi 6 avril sans appel à la grève. Ces échéances peuvent être l’occasion de relancer la mobilisation et jeter les bases d’un rapport de force, primaire et secondaire uni, pour contrer la politique du gouvernement.

12/03/13

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