FT-CI

Débat sur le « programme minimum consensuel » de Madrid

Pour un programme contre le Régime de 1978 et pour que les capitalistes paient leur crise

31/05/2011

Par Sara Povo

Pendant les derniers jours, dans plusieurs rassemblements il y a une idée qui a été discutée, celle de parvenir ã un accord programmatique minimum qui regroupe l’ensemble des sensibilités et idéologies qui font partie de ce mouvement large. Le premier rassemblement qui a adopté une déclaration de ce type a été celui de Sol ã Madrid. Il y a quatre points minimum qui ont été approuvés : la réforme de la loi électoral et l’élargissement des mécanismes de participation citoyenne, des mesures contre la corruption et pour la transparence, la séparation effective des pouvoirs et des mécanismes de contrôle citoyen sur les politiciens.

De notre point de vue, cette petite plate-forme ne constitue qu’un programme de réforme cosmétique au Régime de 1978, qui pourrait parfaitement être adopté par les différents partis bourgeois ou petit-bourgeois qui se présenteront en 2012. L’aile « Chacon » du PSOE – il faut voir s’ils ne présentent pas un autre candidat aux primaires – parlait déjà d’introduire dans leur programme des « clins d’œil » de réforme du système pour attirer les indignés, pour ne pas parler des tentatives désespérées de l’IU (Gauche Unie)– allié du PSOE dans plusieurs gouvernements – de vouloir apparaître comme le porte-parole du mouvement 15M.

Il s’agit en plus d’un recul politique par rapport aux mots d’ordre qui étaient adoptés dans les AG avant le 22M. A la Puerta del Sol, on a adopté une table de revendications qui était une bonne base sur laquelle commencer ã discuter un programme contre cette fausse démocratie au service des riches et pour que les capitalistes paient leur crise. Pour avancer vers une « démocratie réelle » on proposait quelques revendications très intéressantes contre les principales institutions de ce Régime, comme par exemple la Monarchie, le Sénat ou la chambre des députés. Contre les conséquences de la crise on avait la proposition de la répartition des heures de travail, l’interdiction de sauvetage à la banque, l’augmentation des impôts aux grandes fortunes ou l’augmentation du personnel de l’éducation et la santé. Dans d’autres AG comme celle de Barcelone on a même amélioré ces propositions avec des revendications contre la Loi contre l’Immigration et les CIES, pour l’interdiction des contrats temporaires et les ETTs ou pour la nationalisation de la banque. C’est sur ces points que nous devons discuter la plate-forme revendicative du mouvement.

Nous ne pouvons pas parler de la lutte pour une « démocratie réelle » sans vouloir résoudre les problèmes démocratiques les plus structurels du Régime de 1978. La lutte contre la Monarchie et ses institutions, pour le droit à l’autodétermination des nationalités qui intègrent l’Etat espagnol, contre l’impunité des policiers, juges, politiciens et patrons qui ont fait partie de la Dictature, pour la fin des subventions à l’église et le contrôle que celle-ci exerce sur la moitié de l’éducation, contre la Loi des Partis, la persécution des militants, pour l’expropriation des terres des latifundiaires encore aristocrates… et bien-sûr on ne peut pas concevoir une démocratie avec 5 millions de « citoyens de seconde zone », les immigrants.

La régularisation de tous les sans-papiers, la fin des lois contre l’immigration, les CIEs et la persécution policière quotidienne doivent faire partie de nos revendications fondamentales . Mais il faut aussi prendre en compte qu’un peuple qui opprime un autre peuple ne pourra jamais être libre, et c’est bien ã cause de cela que la lutte pour une « démocratie réelle » implique aussi le fait de lutter contre l’impérialisme espagnol et ses multinationales, contre la présence des troupes espagnoles à l’étranger, pour la restitution des enclaves coloniales de Ceuta et Melilla, pour l’arrêt du soutien aux régimes réactionnaires comme ceux du monde arabe, pour la remise des possessions des multinationales espagnoles aux différents pays où ils opèrent…

De la même façon, l’indignation qui nous a fait sortir dans la rue ã ses racines dans les attaques, le chômage et le manque des perspectives pour le futur. C’est ainsi que le mouvement 15M doit donner une réponse ã ces problèmes. Il s’agit de les résoudre ã partir des bénéfices et des intérêts de ceux qui ne vont pas joindre le mouvement, les banquiers et les patrons. La répartition des heures de travail sans réduction de salaire, la nationalisation sous contrôle ouvrier de toute usine qui ferme ou licencie, expropriation des logements des spéculateurs, la nationalisation de la banque et l’interdiction d’expulsion des locataires... Ce sont quelques revendications urgentes que nous devons mettre en avant.

Nous devons prendre en compte le fait que la droite profite des effets terribles de la crise sur des secteurs des travailleurs et des classes moyennes en leur donnant une réponse réactionnaire surtout en culpabilisant le travailleur ou jeune immigrant. Cette tendance, qui se reproduit aussi en Europe – tel que l’exprime la montée dans les sondages de Marine LePen du Front National français - , ne pourra être arrêtée que par la mobilisation des indignés si elle fait un pas vers la convergence des luttes et des travailleurs tout en ayant un programme qui répond aux problèmes et aux aspirations des millions des personnes qui voient aujourd’hui comment la crise frappe sur eux. Ce qu’on appelle les « mínimos » de consensus sont bien loin de pouvoir jouer ce rôle nécessaire et risque de faire que le 15M soit assimilé par certains partis du Régime, qui ne vont pas empêcher la montée du populisme de droite – du PP ou d’autres partis – pour diriger le mécontentement des secteurs sociaux.

La “vague bleu” du 22M, les tendances vers la droite se renforcent aussi

Par Guillermo Ferrari

L’ indignation exprime en premier lieu la séparation croissante entre le PSOE – le côté gauche du Régime du bipartisme espagnol – et un secteur important de son électorat. Une partie d’entre eux a voté nul ou blanc – qui a gagné 280.000 voix, le plus fort score sous la démocratie- , l’abstention ou le vote aux options considérées plus ã gauche, comme par exemple IU qui a gagné 200.000 voix et d’autres partis extra-parlementaires qui ont réussi ã gagner, dans son ensemble, 300.000 voix de plus qu’en 2007. Il faut souligner le résultat historique qu’a obtenu la coalition de la gauche abertzale Bildu (313.000 voix, le 25% dans le Pays Vasque, juste derrière le PNV), et aussi le bon résultat des CUP dans Catalunya (62.000 voix).

Mais le plus préoccupant est la soi-disant “vague bleu”. La droite, avec le PP en tête, a obtenu une différence historique de 10 points par rapport au PSOE, même s’il n’a gagné que 550.000. D’autres options « gagnantes » sont le populisme de droite espagnol UpyD (avec 460.000 voix, 208.000 dans la capitale) et le xénophobe PxC, qui a gagné du poids dans certaines mairies de la zone industrielle de Barcelone, avec 65.000 voix. Il y a donc des tendances de lutte vers la gauche comme le réveil de la jeunesse, en même temps que la droite espagnole – avec beaucoup de tradition et une base sociale encore assez large, et prête ã militer si nécessaire – avance aussi.

Peu ã peu la fin du pacte social devient une polarisation sociale qui annonce l’épreuve difficile qui devra passer le Régime de 1978 dans la prochaine période.

Cet article est une contribution extraite du site de Clase contra Clase, section de la FT-QI dans l’Etat espagnol et a été traduit par Laura Jacques.

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